Expérience de vie

Première fois

Il y a toujours une première fois. Première fois, pour mon voyage dans le sud; pour une croisière; pour me baigner dans la mer.

Aujourd’hui, 9 janvier 2012, à 42 ans, je réalise un rêve de mon enfance, la mer.

Nous avons amarré près de Samana. Ce sont de petits bateaux, pouvant contenir 50 personnes, qui nous conduisaient à l’île.  Certains étaient des bateaux de sauvetage de notre bateau mais moi, chanceuse comme je suis, j’avais un « speedboat ».  Sans veste de sauvetage car ici, c’est un autre monde.

Mon sac de plage sur les genoux, lunette de soleil sur le bout de mon nez, sourire fendu jusqu’aux oreilles et le vent qui ébouriffe mes cheveux au gré de sa force.  Nous augmentons notre vitesse et montons sur le « step ».  Je suis aux anges.  La vitesse est grisante, des gouttelettes d’eau éclaboussent le bateau et j’en reçois quelques unes sur mon visage.

Arrivée au quai

À peine 10 minutes et nous débarquons à quai avec l’aide des gentils messieurs qui me tiennent la main, galamment, fermement.

Nous sommes accueillis sur le quai par une troupe de musiciens et de danseurs.  Question de nous mettre dans l’ambiance latine de l’île.  Nous avons parcourus la distance entre le quai et la plage en plus de 20 minutes.  Arrêts fréquents de ma part pour prendre de magnifiques photos à peindre.  Paradisiaque ! Je suis émerveillée ! Mes yeux semblent ne pas être assez grands pour capter toute la beauté de cet endroit.  Malgré les nuages, les couleurs sont tout de même exceptionnelles, vibrantes, éclatantes, le soleil semble irradié de chaque objet; l’océan scintille comme une émeraude, le sable d’un blanc farineux et des palmiers gigantesques,. Cette fois, je sors d’un décor exotique, une délectation non seulement pour mes yeux mais également pour mon âme.

Un pélican est au rendez-vous près du quai.  Je lui souri de toutes mes dents et je sais que mon énergie se rend jusqu’à lui.  Sur le chemin menant à la plage, un vieux monsieur joue de la guitare en chantant, lorsque je passe devant lui, il fait une légère pause et me glisse un « holà » doux, trainant, chantant, une musique d’une pureté à mes oreilles, je suis profondément touchée par son regard amical, souriant et serein.  Je lui réponds avec un sourire dans ma voix, mes yeux pétillent, son sourire devient immensément heureux.  Je viens de rencontrer un ange. 

La plage

Mon pas dansant me porte vers la plage.  Je choisis ma chaise longue, installe ma serviette de plage au couleur de Celebrity.  J’enlève mes sandales et je glisse mes orteils dans le sable fin, je jette mon sac de plage par terre, enlève rapidement ma petite robe soleil, mes lunettes et je m’élance lentement, calmement vers l’océan.  Je savoure chaque instant.  Un soleil timide joue à cache cache avec les nombreux nuages. 

Le sable est d’un blanc crémeux, fin, doux sous les pieds, je m’approche et la vague vient doucement caresser mes orteils.  Ouf ! Je retiens ma respiration ! Elle est froide !  Je m’avance, passe par-dessus l’accumulation de coquillages rejetés et polis par la mer et lentement et laisse les vagues déferler sur mon corps.  Puis, je plonge, refait rapidement surface, essuie mes yeux et passe ma langue sur mes lèvres, elles sont sacrément salées.  Je me laisse porter par l’eau de l’océan qui, près de la plage à une couleur turquoise claire, absolument magnifique !

La mer

Un banc de petits poissons passe près de nous et, un des leur semble m’adopter.  Il est continuellement près de mon corps, si petit, si rapide et, je prends ce moment comme si la mer m’offrait un bonjour particulier.  Je suis la seule du groupe qui a été adopté par un petit poisson, tout le monde rigole.  Alors, je l’ai appelé « curieux ».  Et oui, je nomme les animaux que je croise, une façon de dire à mère nature que j’apprécie son incroyable travail d’artiste.  J’ai dû me séparer de « curieux » et aller m’étendre au soleil pour me faire sécher, pour lézarder avec quelques grains de sable collés à ma peau me donnant immédiatement un goût de vacances de rêves.  Lorsque j’ouvre mes yeux, allongée sur ma chaise, je vois des palmiers, un ciel bleu, cette fois, je ne rêve pas !

Le menu de ma journée : me rafraîchir, lézarder, sommeiller, la vie est magnifique !

Retour au bateau

Le retour au bateau fut particulier.  Ce fut un bateau de sauvetage du Celebrity qui me ramena à bord, mais pas tout à fait à bon port… jusqu’au bateau ? Oui ! Malheureusement, une complication s’immisça lors de mon embarquement.  Le bateau était de type fermé, je devais enjamber pour embarquer sur la plate-forme et monter les escaliers afin d’entrer dans le Celebrity.

Passer une après-midi complètement avec un tel menu agrémenté d’une solide grippe et d’une bière… me laissa quelque peu maladroite.  Alors, dès que j’ai voulu enjamber, aucune idée de ce qui se passa réellement, mes pieds se mêlèrent ensemble et je perdis pied directement au-dessus de la mer, entre les deux bateaux. 

Ô secours

J’ai bien vu que mon atterrissage serait directement entre l’espace libre entre les bateaux. Dangereux.  Je vais rester coincée et me faire écrasée, c’est certain.  Je n’ai  pas eu de réaction. J’ai figé. Les yeux ronds, le cœur battant rapidement tout à coup.  Deux paires de bras de fer me saisirent, un du bateau de sauvetage et l’autre venant de l’officier sur la plate-forme.  J’ai flotté dans les airs pendant quelques secondes.  Au final, je n’ai récolté qu’un bleu sous le bras droit.  

L’officier m’a demandé, avec son accès du nord de l’Europe, si j’étais correct.  Je lui ai répondu : oui, avec un rire de fille complètement d’allure citadine avec un pois à la place de la cervelle.  Cette fois, mon QI est sûrement demeuré suspendu entre les deux bateaux.  En remontant l’escalier afin d’entrer à l’intérieur du Celebrity, la dame derrière moi a perdu sa « gougoune » entre les marches, direction la mer. J’ai souri et je me suis dis que, moi, au moins, je ne perdais pas mes gougounes dans la mer parce que quand elles tombaient, je demeurais solidement dedans, un sourire niais a passé sur mon visage afin d’effacer la peur qui m’a frôlé pendant quelques secondes, rapide et malicieuse. 

Mon souvenir de cette suspension dans les airs… je me suis sentie féminine et fragile comme jamais.  Ben oui, finalement il y a toujours une première fois.

Renée L’Abbé

17 janvier 2012